Après le triomphe public et critique de La Haine, Mathieu Kassovitz avait devant lui un boulevard pour faire à peu près ce qu’il voulait. Mais eu lieu de capitaliser sur son nouveau statut de wonder boy du cinéma français avec un film fédérateur, il préfère balancer un immense crachat à la gueule de la société hexagonale avec cet Assassin(s), tiré d’un de ses courts métrages. Le film cherche à montrer l’impact d’une sphère médiatique promouvant la violence, la haine et l’individualisme sur une génération dénuée de la capacité à décrypter les messages dont elle est bombardée. Et en matière de bombardement, Kassovitz s’y entend, assénant des scènes d’une impitoyable férocité. Sa mise en scène inventive et puissante, ses comédiens impériaux (le duo qu’il forme avec Serrault est inoubliable) et sa méchanceté de tous les instants font passer la pilule d’une radicalité parfois binaire, qui ferait passer Haneke pour un modèle de subtilité. Reste que ce geste rageur d’un réalisateur peu désireux de flatter la critique dans le sens du poil continue d’être une réjouissante et nécessaire anomalie dans le paysage trop sage du cinéma français.