Après Ring et sa suite, Hideo Nakata confirme son emprise sur l’horreur japonaise et livre avec Dark Water un autre chef d’œuvre torturé. Par sa mise en scène emportée, le réalisateur transforme l’immeuble au cœur de l’intrique en organisme vivant, suintant la mémoire des drames passés, et fait de l’eau une métaphore de la peur et du désarroi, s’infiltrant partout. Car Dark Water, c’est avant tout le portrait poignant d’une femme seule, prise dans un système patriarcal qui la dépouille de tout : logement, dignité, voix... Elle incarne le cœur battant de cette tragédie intime, un cri de rage étouffé sous la pluie. Dans cette terrifiante déliquescence, la partition de Kenji Kawai résonne comme un écho spectral : nappes sonores ténues mais obsédantes, brouillant la frontière entre réel et cauchemar. Plus de vingt ans après, Dark Water demeure l’une des œuvres les plus troublantes et déchirantes du cinéma d’horreur moderne, et ce n’est certainement pas son remake américain détrempé qui changera la donne.