En 1972, Blacula, le Vampire Noir fait se rencontrer l’horreur et la blaxploitation avec un certain succès commercial. Quand le dramaturge afro-américain Bill Gunn est approché par deux jeunes producteurs pour réaliser un film qui surferait sur le succès de Blacula, il en profite pour détourner la commande et créer une œuvre hautement expérimentale, dominée par un symbolisme onirique déroutant. Ganja & Hess combat de l’intérieur l’impulsion mercantile qui l’a fait naître pour mieux parler de thèmes majeurs pour le public afro-américain : assimilation forcée, tiraillement culturel entre deux continents, hypocrisie religieuse… Avec son duo d’acteurs totalement habités (le Duane Jones de La Nuit des Morts-Vivants et l’iconique Marlene Clark), le film délaisse les terres de l’exploitation vampirique pour se muer en expérience hypnotique radicale. Le distributeur américain charcutera le film pour le sortir sous le titre Blood Couple dans une version dénaturée. Heureusement, une copie intégrale conservée par le Musée d’Art Moderne de New York permettra de faire vivre Ganja & Hess sous sa forme initiale, au point qu’il sera finalement jugé comme l’un des sommets du cinéma américain des années 1970, et remaké par un certain Spike Lee qui lui voue un culte éternel.