Un point de lumière se déploie, se densifie, devient un corps céleste… avant de se fondre dans un iris. Ainsi s’ouvre cette œuvre unique, et ainsi naît l’être énigmatique en son cœur : une figure extraterrestre en mission d’annihilation, incarnée par une Scarlett Johansson à mille lieues des choix attendus de sa carrière. Tourné en partie en "guérilla" dans les rues de Glasgow, le film privilégie l’instant, l’insaisissable, l’expérience sensorielle qui échappe au langage. Tout se joue dans les silences, les gestes, les vibrations... Under the Skin raconte la mutation silencieuse d’une prédatrice en un être touché par l’humanité, avec toute la beauté et toute l’horreur que cela implique. C’est un film romantique au sens le plus noir, héritier indirect du Frankenstein de Mary Shelley, avec sa créature artificielle qui cherche à rejoindre les vivants mais se heurte aux violences qui cimentent leur monde. C’est l’éveil bouleversant d’un être qui, en s’humanisant, se rend vulnérable à la brutalité nue de l’homme, une brutalité que Jonathan Glazer continuera d’explorer, sous une autre approche mais non moins intelligemment, dans sa glaçante Zone d’Intérêt.